24 juin – Honkytonk man – La métaphore du manioc

HONKYTONK MAN

« Un gars qui meurt, ça plait au public, ça ! » (extrait du dialogue)

« Je vivrai ma vie à mes conditions ou pas du tout » (Rod Stoval)

 

Drame, USA, réalisé en 1983 par Clint Eastwood

Avec Clint Eastwood, Verna Bloom, Kyle Eastwood, John McIntire,

Pendant la grande dépression des années trente, Rod Stoval, un chanteur alcoolique et tuberculeux, part pour Nashville en compagnie de son neveu, Whit, et son grand-père, afin de participer à une audition auprès de professionnels du disque à la recherche de nouveaux talents.

Clint Eastwood s’est fait connaître en jouant, puis en réalisant des westerns ou des films policiers. Pour prendre de la distance par rapport à ces personnages qui lui collaient à la peau et à cette violence, il décide en 1982 de tourner ce film qui va marquer un tournant dans sa carrière. C’est le neuvième qu’il réalise et le deuxième qu’il produit.

 

Très loin de l’un de ses premiers rôles dans Tarentula de Jack Arnold (1955), il campe ici Red Stoval, « un mélange de Hank William, Red Folley, Bob Wills et de tous ces chanteurs qui buvaient leur whisky sans eau, consumaient leur vie sur la route et finissaient par se détruire ».

Trois traits principaux caractérisent ce film :

1) La ballade, la musique joue le rôle d’un trait d’union, d’un chant initiatique. Le parcours de Rod est scandé par des sortes de couplets et de reprises. De nombreuses scènes se font systématiquement écho deux à deux

 

2) C. Eastwood applique ici un style qui va devenir son « classicisme » : nécessité du passeur, fermeture en écho à l’ouverture (principe de la boucle), l’imperceptible, la discrétion, la concision, les petites touches, la litote, la manière réticente et furtive des émotions. Et particulièrement, et il sera aidé en cela par ses chefs-opérateurs successifs, l’esthétique des ombres et de la lumière.

 

3) La transmission, thème essentiel se traduit par la morale, la réflexion sur le mythe de l’origine, la nostalgie, le savoir mourir, mais la célébration de la transmission de l’art et l’insoumission au destin et son triomphe…

C’est le film incontournable qui contient déjà les clés de l’œuvre de Clint Eastwood et qui permet de comprendre son cheminement  !

Florilège de la presse :

« Il est délicieux, Clint, avec son visage de dur cynique démenti par la tendresse du regard et l’ironie de sa voix. Il est diablement dégourdi, Kyle, avec ses yeux d’ange et ses tâches de rousseur ». Claude Baignères dans Le Figaro plante le décor de ce film en duo, duo d’acteurs père et fils qui ici jouent un oncle et son neveu.


Honkytonk Man reprend « un thème cher à la littérature, au cinéma et à Eastwood, explique Télérama, l’initiation de l’adolescent par l’adulte omniscient ». Autre richesse du film : sa toile de fond. On est dans l’Amérique de la Grande Dépression, qu’Eastwood filme « avec une nostalgie complice : tempêtes sèches, ranches abandonnés, exodes californiens, misère et grand vent », décrit L’Express.

Le scénario est « remarquablement ficelé » salue La Croix, d’autant plus fort cette fois qu’il participe à la déconstruction du mythe. Gérard Lefort explique le procédé dans Libération : « Clint Eastwood fait mieux que confirmer ses talents de cinéaste, il se détruit consciencieusement devant nous. Le masochisme n’est pas qu’apparent (…). Jamais on n’a été aussi loin dans un exercice de déglingue appliqué à soi-même » s’extasie-t-il.

Eastwood dévoile une de ses faces cachées, et « de film en film, prend son mythe à contre-pied, (…) la violence va diminuant et s’efface devant un monde de marginaux » analyse L’Express. Il livre une « œuvre importante de dépassement de son propre mythe, aussi puissante que poignante » renchérit Le Parisien.
Honkytonk Man marque aussi une rupture de ton chez le réalisateur. « Le dur s’est fait tendre pour la country music » constate France Soir. Il nous entraîne « à cent lieues des aventures brutales et des règlements de comptes sans merci » habituels, complète Le Matin.

Comment s’y prend-il ? « Un peu lentement, mais avec quelque humour et beaucoup de gentillesse » apprécie Les Echos. Le Monde évoque « le charme familier, attendrissant, d’une ballade à contre-courant des modes ». Le Parisien s’attarde sur « des images splendides » et une certaine forme de pudeur bouleversante. Pour Révolution, Honkytonk Man « se regarde comme s’écoutent ces airs de cow-boys, avec la facilité du déjà entendu et le plaisir de se savoir en terrain de connaissance ». Un film « agréable à regarder et aussi à entendre » appuie encore La Vie Ouvrière.

Quoi qu’il en soit, retient France Soir, « ce film place Clint Eastwood parmi les cinéastes qui savent nous entraîner dans leur univers ». Il est d’ailleurs intéressant de reprendre les conclusions du Monde à la ressortie du film en 1992 : « A sa sortie, Honkytonk Man n’a pas attiré les foules. L’échec a été sérieux au point que le cinéaste en aurait, paraît-il, perdu sa place de parking à la Warner, le distributeur du film. Une broutille. Il n’empêche, le public n’a manifestement pas désiré voir son héros, à l’image pourtant déjà si sérieusement brouillée, mettre en scène une telle déglingue de lui-même (…). Quant à la critique, à partir de Honkytonk Man, elle ne l’a plus regardé comme un simple acteur-réalisateur de divertissement. Elle a presque unanimement reconnu l’existence d’un cinéaste, sensible et sincère, capable de produire des œuvres aussi émouvantes qu’attachantes ».

Un film d’une importance capitale pour comprendre le cinéaste Clint Eastwood.  « Honkytonk man » est à Eastwood ce que « E.T. » est à Spielberg, les « 400 coups » à Truffaut, « Citizen Kane » à Welles.  (On r’fait le film)

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Le court

La métaphore du manioc

de Lionel Metta

Interprétation : Daniel Ndo / Mata Gabin / Ricky Tribord

Synopsis : Yaoundé, à l’aube. Coco, camerounais d’une vingtaine d’années, conduit dans son taxi une jolie jeune femme. Sur la route de l’aéroport, il lui fait la cour. Mais celle-ci parait absente. Mélancolique, elle regarde vers les rues de la ville qu’elle quitte.

L’avis du programmateur : Comment se débarrasser d’une belle tigresse, opiniâtre et légèrement fêlée, quand on est un jeune chauffeur de taxi fauché à Yaoundé ? À la suite d’un malentendu, Coco se voit contraint de conduire une jeune femme à Denver dans le Colorado. L’absurdité de la situation, accentuée par la mise en scène et l’efficacité des dialogues, donne des accents lubitschiens à ce deuxième film de Lionel Meta. Comédie subtile et piquante, La métaphore du manioc se révèle être une critique sociale, sorte de fable (immorale) dressant avec une fausse désinvolture le portrait d’êtres désabusés

Récompenses :

Mention spéciale du jury,Prix de l’espoir de la loterie Nationale du Burkina,Prix du meilleur talent émergent de la Francophonie, FESPACO (Ouagadougou / Burkina Faso – 2011)
Prix spécial du jury, Armoricourt (Plestin Les Grèves / France – 2011)
Mention spéciale Apollo, Festival du premier court métrage (Pontault-Combault / France – 2010)
Grand prix, Meilleur acteur, Meilleure actrice, Festival international du court métrage (Abidjan / Côte d’Ivoire – 2010)
Prix du meilleur film, Festival de cinéma d’animation du Val d’Oise, Image par Image (Itinérant (Val d’Oise) / France – 2010)
Prix Cinécourt,Prix du public, Festival international du film (Amiens / France – 2010)
Prix du meilleur film, Festi’Val d’Oise du court (Isle-Adam / France – 2010)

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