24 novembre – Papicha – Sous tes doigts

Dans le cadre de la

Journée Internationale contre les violences faites aux femmes

PAPICHA

de Mounia Meddour

Date de sortie : 9 octobre 2019

Durée : 1h 45min

Réalisatrice : Mounia Meddour

Avec : Lyna Khoudri, Shirine Boutella, Amira Hilda Douaouda

Genre : Drame

Nationalités : française, algérienne, belge, qatarienne

Alger, années 90. Nedjma, 18 ans, étudiante habitant la cité universitaire, rêve de devenir styliste. A la nuit tombée, elle se faufile à travers les mailles du grillage de la Cité avec ses meilleures amies pour rejoindre la boîte de nuit où elle vend ses créations aux  » papichas « , jolies jeunes filles algéroises. La situation politique et sociale du pays ne cesse de se dégrader. Refusant cette fatalité, Nedjma décide de se battre pour sa liberté en organisant un défilé de mode, bravant ainsi tous les interdits.

Après des études de journalisme à la faculté d’Alger, Mounia Meddour obtient une Maîtrise en information et communication à Paris 8. En 2000 elle se forme au cinéma à La Fémis et à la production au Centre Européen de Formation à la Production de Films. Mounia réalise plusieurs documentaires : Tikjda : la caravane des sciences, Particules élémentaires, La Cuisine en héritage. Son documentaire Cinéma algérien un nouveau souffle s’intéresse aux jeunes réalisateurs de sa génération qui ont vécu la « décennie noire ». Son court métrage Edwige a été sélectionné dans de nombreux festivals internationaux et a remporté plusieurs prix.

La réalisatrice Mounia Meddour a fait toute sa scolarité en Algérie, puis une année de fac de journalisme pendant laquelle elle habitait une cité universitaire très proche de celle du film. « Au terme de cette année, alors que j’avais dix-sept ans, ma famille a décidé de quitter le pays. Les intellectuels étaient en première ligne. Mon père, lui-même cinéaste, avait subi des menaces, c’était le cœur de ce qu’on a appelé la « décennie noire ». Nous nous sommes installés en Seine-Saint-Denis où la mairie de Pantin avait facilité nos démarches et accueillait déjà beaucoup de familles d’artistes et d’intellectuels algériens. A mon arrivée en France, je me suis inscrite en Maîtrise d’information et communication, puis je me suis orientée vers le cinéma documentaire. J’ai eu la chance de suivre un stage d’été à La Fémis, cofinancé par l’Institut français d’Alger. Tout en continuant à faire du documentaire, j’ai tourné un premier court métrage de fiction, Edwige. Ensuite est né le projet de Papicha.« 

Tout ce que vivent les filles dans la cité universitaire du film, c’était bien le quotidien d’étudiantes algéroises à la fin des années 90, confie la cinéaste Mounia Meddour. « Y compris le mien. Avec l’intégrisme montant, l’oppression tout autour. Mais l’attentat dans la cité universitaire est un ressort dramatique de fiction. Comme la passion de Nedjma pour la mode qui prend une dimension symbolique : ce que les islamistes voulaient, à cette époque-là, c’était cacher le corps des femmes. Pour moi, la mode, qui dévoile et embellit les corps, constitue une résistance aux foulards noirs. »

Voici la définition du « françarabe », un dialecte qu’on entend beaucoup dans Papicha : on prend un mot français et on « l’algérianise » et puis on mélange sans cesse les idiomes. Mounia Meddour voulait que le film ait ce rythme et cette richesse – car c’en est une ! -, et c’est une vraie spécificité algéroise. « Je voulais ancrer le film dans une ville que je connais et que j’aime, avec sa douceur de vivre paradoxale. Papicha est ainsi un mot typiquement algérois, qui qualifie une jeune femme drôle, jolie, libérée. »

Au départ, Mounia Meddour tenait absolument à ce que son héroïne soit algérienne. Lorsqu’elle a rencontré Lyna Khoudri, elle a toute de suite été happée par sa force et sa fragilité. « Il y a chez elle cette innocence et cette fougue mais aussi une rigueur formidable et une exigence de vérité. En discutant avec elle, j’ai découvert que son histoire personnelle était proche de la mienne. Son papa était journaliste et sa famille a dû fuir l’Algérie dans les années 90. Elle a dû tout reconstruire comme moi. Je n’aurais pas pu trouver une comédienne qui comprenne mieux le personnage de Nedjma. Avec Lyna on a échangé, préparé et répété, peaufiné les détails et les dialogues même sur le tournage. On a construit et déconstruit les réactions et les émotions de Nedjma en créant des paliers émotionnels qui ont été très utiles puisque nous avions tourné les séquences dans le désordre. »

Pour Mounia Meddour, il était naturel et primordial de tourner à Alger, la ville qui l’a vue grandir. L’équipe a tourné les scènes de cité universitaire à Tipaza, dans un complexe touristique construit par Fernand Pouillon : un lieu peu rénové, donc vide, dont la réalisatrice a pu redécorer le réfectoire et les chambres avec sa talentueuse chef décoratrice Chloé Cambournac. « On a aussi tourné à Alger, notamment dans la casbah, quand Nedjma se fait gentiment suivre par un garçon qui la drague avec beaucoup d’imagination. C’est ce qu’on appelle en Algérie un « hittiste », du mot arabe qui désigne le mur, parce qu’ils passent leurs journées adossés aux murs des maisons. Tourner en Algérie me permettait aussi d’ajouter une véracité presque documentaire : dans le bus, par exemple, quand j’ai vu arriver le receveur avec sa gestuelle singulière, ses pièces de monnaie qu’il faisait claquer entre ses doigts habiles et ses mains noircies, j’ai imaginé une scène autour de lui. J’aime fusionner la réalité et la fiction. Je voulais aussi le parler algérois qui est tellement vivant, créatif et souvent hilarant. »

(d’après les « Secrets de tournage » sur Allociné)

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Le court

Sous tes doigts

de Marie-Christine Courtès

12’54 ; Animation ; Comédie dramatique,Portrait ; France ; 2014 ; Film muet

Un film sensible, magnifique, historique !

Le jour de la crémation de sa grand-mère, Émilie, une jeune métisse asiatique, se plonge dans les souvenirs de la vieille femme. Elle découvre l’Indochine de Hoà, sa rencontre amoureuse avec Jacques, un colon français, la naissance de Linh, sa mère, et le départ tragique vers la France en 1956.

Sous tes doigts est l’une des plus éclatantes réussites de l’animation française en 2015, effectuant un véritable tour du monde des festivals, où sa facture esthétique impeccable séduit immanquablement, tout comme l’inspiration même du projet, à savoir la volonté de ressusciter les oubliés de la guerre d’Indochine, elle-même si peu connue des jeunes générations. La grande Histoire y plane sur celle, plus intime, d’une famille exposée aux difficultés de l’exil et son cortège de vexations, l’internement de plusieurs années au camp de Sainte-Livrade, dans le Sud-ouest, ayant frappé de nombreuses femmes, dont la grand-mère de la jeune héroïne du film.

C’est la réussite majeure de Marie-Christine Courtès que d’avoir su faire s’entrechoquer les époques et dialoguer les générations, les arabesques du hip-hop répondant aux traditions culturelles extrême-orientales. Une véritable splendeur, tant graphique qu’émotionnelle.

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