Le choix proposé portait sur 3 films de Jean-Pierre Melville :
Le silence de la mer, 1949
Le samouraï, 1967
L’armée des ombres, 1969
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Le choix s’est porté à 61% sur
Le silence de la mer
Durée : 1h 28min
Réalisé par : Jean-Pierre Melville
Avec : Howard Vernon, Nicole Stéphane, Jean-Marie Robain…
Genres : Drame, Romance, Guerre
Nationalité : française
Après l’armistice de 1940, un vieil homme vit retiré à la campagne avec sa nièce. Ils se voient contraints par la Kommandantur d’héberger un officier allemand. Bien décidés à ne pas parler à ce représentant des forces d’occupation, il l’accueillent dans une maison aussi froide et silencieuse qu’un tombeau. Cependant, au fil des visites de von Ebrennac – qui, chaque soir, fait un court passage dans le salon et livre ses pensées à ses hôtes – ils découvrent un homme intelligent, sensible et sincèrement amoureux de la France.
Œuvre d’adaptation mais œuvre cinématographique à part entière, le film de Jean-Pierre Melville se révèle être un des fondements de la Nouvelle Vague.
L’adaptation est ici atypique par rapport aux adaptations postérieures auxquelles Melville se confrontera. La survie du film tenait à une fidélité exemplaire à l’ouvrage sous peine de voir le négatif passer par les flammes en cas de désaccord du jury. C’est ainsi que la fidélité au texte transpire tant sur le fond que sur la forme. Sur le fond, le film procède à de simples inversions narratives introduisant par exemple au début du film une scène qui devrait normalement se passer à la fin : c’est pour utiliser le procédé du flashback et faire raconter l’histoire que nous connaissons par l’oncle : c’est la dernière page de la nouvelle qui est d’abord lue et qui enchaîne sur le début de l’ouvrage. Sur la forme, l’ouverture du livre par le passeur au début du film et le dernier plan qui fixe la dernière page imprimant les derniers mots prononcés accentue l’impression de transcription littérale et encadre le film par la couverture du livre.
« Paru en 1941, le livre de Vercors était un appel à la dignité. A l’occupant qui n’était pas un SS, la France meurtrie opposait symboliquement un silence obstiné. L’officier finissait par découvrir les vrais buts des nazis. De ce récit, Jean-Pierre Melville, ancien combattant des Forces françaises libres, a fait un magnifique poème visuel, où l’hiver n’en finit pas de la présence allemande, une tragédie en vase clos où, dans le silence, le cœur obsédant d’une horloge bat comme un signe du destin. La voix bourdonnante de l’officier allemand se perd, tandis que les phrases lentes du commentateur tiennent lieu de chœur antique. » (Jacques Siclier, Télérama, 9 /8 /2014)
« Le Silence de la mer propose un vrai parti pris qui est celui d’une narration continue. Il y a d’une part les « interminables monologues » du lieutenant allemand, comme les appelle l’oncle et d’autre part la voix off de ce dernier. Ce dispositif répétitif, qui pourrait être redondant, est important car il porte le sous-texte de l’histoire. Ainsi, c’est la voix off qui répond aux monologues de von Ebrennac, ce dernier n’attendant pas de réponse de ses hôtes forcés, tellement silencieux que l’on ne connaît même pas leurs noms (…) Dans cette petite pièce plongée dans l’obscurité, trois êtres souffrent de ne pouvoir se parler : manière très simple, très humaine de montrer ce que provoque la guerre au-delà des morts, des blessés et des crimes contre l’humanité. » (DVD Classik)
« Ce film n’a pas la prétention d’apporter une solution au problème des relations entre la France et l’Allemagne, problème qui se posera aussi longtemps que les crimes de la barbarie nazie, perpétrés avec la complicité du peuple allemand, resteront dans la mémoire des hommes » C’est par cette phrase que commence le film.
Vercors a longtemps cherché un titre à sa nouvelle ; il se décide enfin pour une image symbolique que le courageux éditeur Oudeville – qui s’est lancé dans cette aventure périlleuse- ne comprend pas : « Moi je dirais plutôt le silence de la nièce ». C’est pourquoi Vercors ajoutera à la fin du récit un commentaire plus explicite : « sous la tranquillité trompeuse de la surface des eaux, [se cache] la mêlée incessante et cruelle des bêtes dans les profondeurs ». Ce récit se présente comme une métaphore de la condition de l’homme face à la guerre qui lui interdit la liberté.
« J’ai voulu abolir le compartimentage traditionnel de la réalisation cinématographique. » — Jean-Pierre Melville.
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Le court
Les pieds sous la table
de François Morel et Marc-Henri Dufresne
France, 1993, Fiction, Couleur, Français – 08’00 -
Synopsis : Maurice et Lucien vivent tous les deux dans la même rue. L’un est célibataire, l’autre veuf. Quand Lucien a perdu sa femme, Maurice lui a dit « Vous viendrez manger à la maison, Lucien ». Depuis, Lucien vient…
L’avis du programmateur : Les pieds sous la table est représentatif de toute une époque, à savoir ce début des années 1990 que dominaient les productions Lazennec, à qui l’on devait l’émergence des Klapisch, Kassovitz, Rochant ou encore Christian Vincent. C’est aussi alors que le petit écran voyait triompher les Deschiens, cette joyeuse troupe réunie autour de Jérôme Deschamps et qui comprenait notamment François Morel, au début d’une brillante carrière qui le mènerait notamment jusqu’au micro de France Inter. Les deux hommes se réunirent sur ce court métrage en forme de sketch, dans un registre d’humour délibérément franchouillard, où la relation entre deux voisins devient savoureusement vacharde autour d’un ‘boudin/purée’ fleurant bon le quotidien des classes populaires de jadis. Il y a d’ailleurs comme un parfum de Jeanson ou des scénaristes du réalisme poétique dans la confrontation des deux Deschamps, qui étaient en réalité oncle et neveu et qui se délectèrent visiblement de s’asticoter ainsi. Jusqu’à une chute elle aussi emblématique de ce qui demeure un âge d’or pour le court métrage français.
Carrière du film :
Prix du public Festival du court métrage (Vélizy-Villacoublay / France – 1994)
Mention Spéciale du Jury Festival national et international du court métrage (Clermont-Ferrand / France – 1994)
Prix fondation Beaumarchais Festival Européen du Film Court de Brest (Brest / France – 1994)
Mention spéciale Festival du cinéma européen (Lille / France – 1994)